Bonjour !
Voici le premier billet de l’année 2020 ! Je tiens à remercier chaleureusement tous et toutes les collègues qui m’ont fait confiance lors de mes formations, vos retours me font progresser ! Je vous souhaite de belles découvertes professionnelles et de trouver du bonheur dans votre vie !
J’ai lu, vu, entendu pas mal de choses intéressantes lors de ce dernier trimestre 2019 mais je souhaitais vous proposer une synthèse concernant une thérapie pour la dysarthrie parkinsonienne, découverte sur un groupe Facebook américain. Il s’agit de la méthode SPEAK OUT !®
En effet, jeune orthophoniste désireuse de trouver des solutions pour mes patients atteints de maladie de Parkinson, je me suis formée à la LSVT® en 2003. J’ai eu l’occasion de prendre en soin beaucoup de patients avec et sans cette technique. J’estimais le nombre impressionnant de publications scientifiques qui la sous-tendent et les progrès que je voyais chez mes patients. J’appréciais moins son côté marketing, la rigidité et la monotonie de la méthode. De plus, certains patients répondaient mal à cette technique : soit parce que cela ne correspondait pas à leur personnalité, soit parce que l’hypophonie n’était pas leur problème majeur. Dans ma pratique, par exemple, j’ai constaté à plusieurs reprises que cette méthode n’améliore pas les troubles du débit.
Ma devise étant « je suis orthophoniste et non « lsvtiste », je me suis tournée vers d’autres alternatives pour ces patients. Je suis convaincue qu’une évaluation rigoureuse permet de choisir l’outil rééducatif le mieux adapté à leurs troubles et leur personnalité ! Par ailleurs, je ressens de plus en plus l’envie de créer un groupe de patients atteints de maladie de parkinson.
C’est donc sans hésitation, qu’après avoir pris connaissance de SPEAK OUT®, je suis allée consulter leur site internet https://www.parkinsonvoiceproject.org/. Ils y proposent beaucoup d’informations dont leurs publications en accès libre (et ça c’est top !). Le programme de formation en ligne coûte 289 USD, il est proposé exclusivement en américain. Il n’y a pas, à ma connaissance, de formation présentielle en France. Ce programme dure 10 heures. Il est constitué de séquences vidéo réparties en 17 chapitres. Chaque chapitre fait l’objet d’un questionnaire de longueur variable qui permet de vérifier les acquis de connaissance. La certification est obtenue après avoir obtenu un score de 100% au questionnaire final. A l’issue de cette certification, l’orthophoniste reçoit un kit avec les objets qui lui seront nécessaires pour travailler selon les recommandations (frais d’envoi payants à destination de l’étranger).
La méthode a été élaborée par Samantha ELANDARY, une orthophoniste américaine qui a elle-même souffert de troubles de communication dans sa jeunesse. Elle se base sur les observations de Daniel R. BOONE orthophoniste et auteur d’un livre intitulé « The Voice and the Voice Therapy » dans lequel il décrit que les personnes atteintes de maladie de parkinson parlent mieux lorsqu’elles parlent avec détermination. Cette observation repose sur le fait que l’atteinte de la voie extrapyramidale caractéristique de la maladie de parkinson touche la production de gestes automatiques (tels que la marche, la parole ou la déglutition) ; par conséquent, si on incite le patient à utiliser la voie pyramidale (motricité volontaire), on améliore ses capacités. Etant donné les difficultés d’accès aux soins pour certains patients américains qui ne peuvent pas payer une assurance privée par exemple, S. ELANDARY a créé une association à but non lucratif. Le principe de la méthode est de proposer une thérapie individuelle dans un premier temps, puis un suivi en groupe.
La thérapie individuelle repose sur les principes de la plasticité cérébrale : un suivi à raison de trois séances hebdomadaires est proposé au patient après une évaluation qui lui permet de prendre conscience de ses troubles et de voir si cette méthode peut lui convenir ; une session d’information sur la maladie de parkinson et le contenu de cette méthode est offerte au patient et son entourage. La durée du suivi individuel dépend du patient, des objectifs fixés et atteints : cela peut aller de deux à cinq semaines. Il est clairement déconseillé, en revanche, d’espacer les séances. Le contenu des séances s’effectue en suivant le livre fourni par l’association au patient qui en a fait la demande. Chaque séance dure environ 45 minutes et commence par un entretien spontané court pendant lequel l’intensité vocale est mesurée. Le programme est constitué de six composants (échauffement, TMP, sirènes, comptage, lecture à haute voix et tâches cognitives) et les exercices à effectuer sont quantifiés grâce à un sonomètre et un chronomètre ; le thérapeute saisit les résultats obtenus afin d’objectiver les progrès auprès du patient, de sa famille, du prescripteur et de la caisse d’assurance maladie. Le thérapeute se doit d’encourager le patient à parler avec détermination et de remplacer toute motricité automatique par une motricité volontaire. Un feed-back est régulièrement proposé au patient que ce soit par un encouragement de l’orthophoniste ou en écoutant un enregistrement audio. L’intensité vocale en spontané après le programme me semble plus adaptée à une communication naturelle. Enfin, le patient est invité à s’exercer à la maison tous les jours pendant 25 jours.
Une fois l’objectif atteint, que le patient est capable de parler avec détermination le plus souvent possible, on lui propose d’intégrer un groupe. Les groupes sont de taille variable mais il est fortement conseillé de constituer des groupes homogènes, notamment en fonction des capacités cognitives des participants. La durée des séances de groupe est d’une heure et elles ont une fréquence hebdomadaire. Les composantes sont reprises en commun et d’autres activités sont proposées afin de maintenir les effets de la session individuelle.
Tous les 3 à 6 mois, les patients sont invités à suivre une à deux séances qui permettent de faire le point et de s’assurer que le patient maintient bien ses efforts au quotidien.
En conclusion, si j’ai trouvé beaucoup de similitudes avec la LSVT®, j’ai également découvert des choses plus en adéquation avec l’orthophoniste que je suis. Le programme me semble cohérent et surtout plus souple. Ici il n’est pas seulement question d’intensité vocale ; il s’agit d’agir avec détermination, de faire le choix d’un acte volontaire, je dirais même « en conscience », ce qui me semble plus global et touche le comportement de communication en entier. Enfin, les études réalisées sont prometteuses et montrent pour certaines (BOUTSEN, 2018) un effet de SPEAK OUT !® sur l’intensité vocale, l’étendue vocale et le débit lors de la lecture d’un texte. Il n’y a donc plus qu’à s’y mettre et passer de la théorie à la pratique ! Je ne manquerai pas de vous en faire le retour !
En attendant, joyeuse année à toutes et à tous !